
La liste est longue des réécritures biographiques, souvent guidées par la famille, pour façonner l’image idéalisée du grand homme – difficile de dire « la grande femme » tellement elles ont été rares à être ainsi immortalisées. Car le regard « respectueux » de certains biographes aura souvent gommé la part réelle et sombre de l’artiste. On pense tout de suite à l’image idéalisée d’un Rimbaud, mystique et œuvre de dieu, que nous propose Claudel et, près de lui, la vie pure d’un Verlaine où sont gommés l’alcool et l’homosexualité ; ou encore, très récemment, la face cachée de l’Abbé Pierre, hagiographie qui avait été minutieusement élaborée par lui-même. Courbet est de ceux-là dont certains proches ont pu, après sa mort, le décrire comme un être passionné, romantique, chevaleresque, « affranchi de la femme » et échappant aux griffes de la commune pour mourir en exil. Jules Castagnary, très proche et fidèle ami, dira même de lui : « Courbet, je dois le dire tout de suite pour qu’il n’y ait pas d’équivoque, étant chaste et pudique… » Curieuse image publique, « chaste et pudique », de celui qui – on le sait aujourd’hui – a composé l’œuvre intime certainement la plus provocante des deux derniers siècles.

À sa mort, en 1877, c’est Juliette, la sœur de Gustave, qui se portera garante de l’image de son frère.
Il en va de même pour de nombreux personnages célèbres, dont la famille, pour conserver l’honorabilité, va volontairement gommer tout un pan de la vie intime ou détruire certains documents inconvenants comme une correspondance adultère ou des écrits « pornographiques ». C’est le cas de Courbet dont certaines lettres viennent d’être retrouvées.


En novembre 2023, en une fin d’après-midi où trois bibliothécaires rangent des documents au grenier de la Bibliothèque d’étude et de conservation de Besançon, ils sont intrigué par une pile de documents posée sur une étagère. À la lecture de cette correspondance – car il s’agissait de lettres intimes – ils comprennent vite qu’il s’agit d’écrits de Gustave Courbet et d’une correspondante à identifier. Ces lettres avaient été déposées cinquante ans plus tôt accompagnées d’une note précisant qu’il s’agissait de « lettres scabreuses ornées de dessins, écrites à une dame par une personnalité célèbre du XIXe siècle », avec charge, pour le bibliothécaire à qui elles avaient été remises, de les garder, sans les communiquer à quiconque et sans les publier. Il s’agit d’un important dépôt : 91 Lettres de Mathilde à Gustave et 25 lettres de Gustave à Mathilde, de novembre 1872 à mai 1873.

La correspondante de Courbet, Mathilde Montaigne Carly de Svazzema, est une jeune aventurière très entreprenante : « Faisons donc ensemble, tout ce que nous pourrons, c’est-à-dire des chefs-d’œuvre en art ! Des chefs-d’œuvre en amour. Bien sûr, quand vous me connaîtrez, je suis certaine que vous m’aimerez. Nous travaillerons ensemble, nous concevront ensemble, nous dormirons ensemble…» Elle répond par ces mots à l’instigation de Gustave : «… Votre beau corps, tendre amie, vos belles formes délicates, seraient toute la journée à la disposition de notre conception. »

Dans cet échange, à la fois intime et totalement débridé, les deux épistoliers sont dans une prudence méfiante tout en jouissant manifestement de l’excitation provoquée par cette rencontre à distance qui nous apparaît aujourd’hui pas si différente des rencontres virtuelles sur Internet. L’aventurière intrigante s’est procuré l’adresse de l’homme illustre qu’elle veut approcher tout d’abord par la demande d’un tableau (première lettre) tout en laissant comprendre à celui-ci qu’elle est très sensible à son charme. Dans sa réponse, Courbet laisse aussi comprendre qu’il y est sensible. L’échange des messages – pourtant très lent à l’époque – plusieurs jours entre chaque lettre – laisse d’autant monter l’excitation…
« Ma tendre bien-aimée, tu me branles, et tu me branles toute mon organisation. Tu veux me faire mourir de plaisir, tu as une telle ardeur, une telle soif de plaisir qu’à son tour on te boit toute entière, on boit ton âme, ton cœur, tes seins gonflés d’amour avec leurs couronnes et leurs boutons roses, ton ventre qui rebondit de plaisir, de volupté, ta motte en moiteur si belle, si dorée, ton grand con tout mouillé pour faciliter son entrée, tes feuilles de roses baignées de rosée et ce petit bouton si rouge qui semble vouloir produire encore d’autres feuilles. » (Gustave, 24 décembre 1872).
De semaine en semaine l’intimité n’en est que plus présente et l’excitation maximale, alors que chacun reste dans la prudence, et même, rapidement, dans la certitude de la non rencontre ! Courbet par excès de méfiance, Mathilde par désappointement et résignation.
« Tu as éveillé mes sens endormis. Tu as appâté ma curiosité. Tu es mon maître. Je suis ta maîtresse, ton amante, ta femme, la suceuse de ta belle pine et de tes couilles. » (Mathilde, 25 décembre 1872).
Acculé de dettes et poursuivi par des députés pour la chute de la colonne Vendôme, Courbet se réfugie à Ornans. La jeune aventurière compatit et le flatte jusqu’à le convaincre de lui envoyer un tableau qu’elle se chargera de vendre à Paris pour lui. Elle est la maîtresse idéale, maintenue à distance, elle est sa « polissonne » dont il craint la rencontre qui vienne rompe le charme : « C’est pour cela que je reste le plus longtemps que je peux dans les préliminaires, car c’est autant de gagné sur la réalité ennemie. » Bien qu’elle ne soit jamais mentionnée, L’Origine du monde, secrètement composée six ans plus tôt, est mille fois présente lorsque Courbet expose à sa « tendre putain » le désir qu’il a de peindre son « grand con dans sa couleur merveilleuse » : « Quand je te tiendrai mon chéri, sais-tu ce que je veux faire ? Je veux faire un portrait scrupuleux de ton grand con dans sa couleur merveilleuse, je veux le faire sur un panneau qui doublera ma boîte de peinture, je l’aurai toujours avec moi, il enchantera mes rêves, où que je sois, qu’il pleuve, ou que le ciel soit bleu, je l’aurai avec moi […] ». De quoi parle-t-il sinon de l’Origine !
Le 18 décembre 1872, Mathilde s’épanche très librement : « Malgré moi, folle que je suis, je lis et relis les lettres de Gustave adoré. Oh Mathilde, ange d’amour ! Âme d’enfant, vous m’avez compris. J’ai fait mieux que cela ! Je vous ai aimé en silence depuis cinq ou six ans, me demandant si le jour pourrait jamais arriver où il me serait permis de vous adresser la parole… » et, plus loin dans la même lettre : « Ainsi pour moi vous avez joui sur le papier. Vous avez déchargé sur cette feuille. Nous sommes révoltants tous les deux… » Et Gustave de répliquer : « envoie-moi ton sperme, je l’aime. » Ailleurs encore, c’est Mathilde qui renchéri : « Aujourd’hui, je puis voir avec mes yeux, mordre avec mes dents, pleurer avec mes larmes, baiser avec m… »

Mathilde et Gustave ne se sont donc encore jamais rencontrés qu’ils se disputent déjà : « Écoute Mathilde, tu es insensée, vrai, tu me dis, il y a trois jours que mon amant ne m’a pas écrit, tu es folle. Je passe mes nuits à cela. » (Lettre de Gustave, 27 déc 1872) et leur relation « virtuelle » emprunte tous les codes des échanges érotiques actuels sur les réseaux : les stimulations (masturbations) à distance, la lettre figurant l’amant(e) et jouant le rôle d’un fétiche excitateur ; l’échange de fluides intimes (Courbet, découvre « un petit coin de ta lettre mouillé, avec un de tes petits poils collé, j’ai un nez de chien de chasse pour ces plumes-là, petite polissonne. » ; échange de Dick-Pic et sexting avant l’heure ! Dans cette brève relation de quelques mois, Mathilde et Gustave vont s’échanger des propos impudiques, des mots souvent très crus, des dessins intimes pornos, représentation du pénis en érection pour Gustave (Dick-Pic), de sa vulve en exploration (sexting) pour Mathilde : le 3 mars 1873, elle lui adresse, sur une feuille découpée, une représentation de son sexe : « Voilà donc la mesure tant désirée de ce bijou que tu veux conserver et qui t’appartient. » Cette très rare, correspondance érotico-porno, sans illusion ni rencontre, apparaît comme un modèle pour la lecture des échanges actuels, avec ou sans lendemain, sur le Net.
En avril 1873, tout bascule. Alerté par son assistant et très proche ami, Cherubino Patà, Gustave, qui n’a pas touché le moindre centime de la vente de l’œuvre confiée à Mathilde, comprend qu’il a été manipulé par une intrigante. En la manœuvrant adroitement, il obtient qu’elle lui restitue les lettres compromettantes, puis coupe tout contact avec elle. Elle s’obstine, annonce sa visite à Ornans, animée des meilleures intentions : « La gogotte est bien ouverte se préparant chaque jour à recevoir l’adorable visiteur annoncé« , lui écrit-elle le 2 mai. Arrêtée à Besançon, peut-être sur dénonciation de Patà, elle est jugée fin juillet au tribunal du Doubs qui la condamne à un an de prison pour avoir adressé « des lettres suppliantes racontant des infortunes aussi intéressantes que possibles à tous les grands personnages de France et d’Europe ». Gambetta et Dumas fils sont cités par la presse. Courbet n’est pas inquiété, il a rejoint la Suisse, où il se réfugie et mourra quatre ans plus tard.
La très belle édition de cette Correspondance de Courbet avec Mathilde*, co-édition Gallimard et la ville de Besançon, a été honorée par le Prix Sade Patrimoine 2025.
* Correspondance avec Mathilde de Gustave Courbet, édité parLudovic Carrez, Pierre-Emmanuel Guilleray, Berenice Rigaud-Hartwig et Laurence, Madeline, Gallimard, 2025 ;
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