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Suède : «Comment les groupes djihadistes veulent surfer sur la guerre à Gaza pour recruter de nouveaux membres»

FIGAROVOX/TRIBUNE – Marco Nilsson, professeur associé de science politiques à l’Université de Jönköping (Suède) et Aya Bejermi, doctorante, analysent les répercussions de la guerre à Gaza en Suède. Les djihadistes, en perte de vitesse, pourraient en profiter pour drainer un nouveau public, expliquent-ils.

Marco Nilsson est professeur associé de science politiques à l’Université de Jönköping, auteur de Jihadism in Scandinavia: Motivations, Experiences, and Change, 2022.

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Aya Bejermi est doctorante à l’Université de Bordeaux Conférencière invitée à l’Université de Jönköping.


La guerre à Gaza a eu des conséquences inattendues en Suède. Les autorités suédoises étaient loin d’imaginer ce que l’avenir leur réservait après le lancement de l’assaut par le Hamas aux abords de la frontière israélienne l’année dernière, car le conflit qui en a résulté a généré de nouvelles formes de préoccupations sécuritaires impliquant les services de renseignement iraniens et les gangs locaux suédois. Ces évolutions pourraient redéfinir le processus de recrutement djihadiste, non seulement en Suède, mais risquent, dans le pire des cas, de se répandre dans d’autres régions d’Europe.

Que s’est-il donc passé ? En janvier dernier, une grenade a été lancée sur l’ambassade d’Israël à Stockholm, sans toutefois exploser. En mai, un mineur de 15 ans a été arrêté avec une arme chargée dans un taxi en route vers l’ambassade. Le lendemain soir, des tirs ont retenti près de l’ambassade, perpétrés par des assaillants inconnus.

Début octobre, des tirs ont à nouveau visé l’ambassade israélienne à Stockholm. Le lendemain, deux adolescents suédois armés de plusieurs grenades ont été interpellés, soupçonnés d’être impliqués dans deux explosions près de l’ambassade israélienne à Copenhague. Peu après, des coups de feu ont été tirés sur les locaux du fabricant d’armes israélien Elbit à Göteborg. Un mineur de 13 ans a été arrêté, soupçonné d’avoir tiré les coups de feu, et un autre adolescent de 15 ans, apparemment lié au réseau criminel Foxtrot, a été ensuite détenu, suspecté d’avoir organisé l’attaque.

Le service de renseignement israélien, le Mossad, a d’abord accusé le chef de gang suédois notoire Rawa Majid et son réseau Foxtrot pour de tels actes contre les intérêts israéliens, apparemment réalisés pour le compte de l’Iran. Ces soupçons ont ensuite été corroborés en Suède. En pleine guerre de gangs, Majid avait déjà fui la Suède pour la Turquie mais avait dû se rendre ensuite en Irak, avant de finalement se retrouver en Iran. Le prix qu’il doit probablement payer aujourd’hui pour son refuge en Iran est de mener des attaques contre les intérêts israéliens au nom de l’Iran.

De telles attaques peuvent être considérées comme une continuité naturelle de l’ancienne stratégie connue sous le nom de l’axe de résistance. Plutôt que d’affronter Israël dans une confrontation militaire directe, l’Iran utilise depuis des années ses proxys, principalement le Hezbollah, pour maintenir Israël sous pression militaire constante et sous la menace de nouvelles attaques. Cependant, avec l’affaiblissement du Hamas et du Hezbollah au cours de la dernière année de combats, l’Iran a cherché de nouvelles tactiques rentables pour maintenir la pression sur Israël, et le chef de gang suédois en quête d’un refuge sécurisé s’est révélé être une opportunité avantageuse.

Avec la diminution de la capacité du milieu djihadiste suédois à attirer de nouveaux membres à la suite du déclin de l’EI, un nombre croissant de jeunes hommes qui auraient pu être recrutés sont désormais attirés par les gangs criminels.

Marco Nilsson et Aya Bejermi

Les motivations de ces jeunes auteurs suédois ne sont ni idéologiques ni religieuses, mais relèvent de l’argent et de la volonté de prouver leur compétence au service du gang. Ainsi, si l’on définit le terrorisme comme de la violence à motivation politique, il est difficile de les décrire comme des terroristes ou des djihadistes. Cependant, ces dernières années, après l’effondrement militaire de l’État Islamique (EI) en Syrie et en Irak, la Suède observe un développement assez unique qui pourrait modifier la situation.

Nombre des rapatriés de l’EI avaient un passé criminel avant de rejoindre l’organisation terroriste qui a semé le chaos non seulement en Syrie et en Irak, mais aussi en Europe. Déçus du sort de l’EI, certains d’entre eux ont repris contact avec ces réseaux criminels. Par ailleurs, certains individus de ces réseaux de gangs ont montré des signes d’intérêt religieux radical, ce qui a donné lieu à des identités doubles.

Un ancien membre de l’EI a décrit que parfois «les gars prient la jumuah [prière communautaire du vendredi] avec des gilets pare-balles». Un ancien recruteur de l’EI a expliqué que «certains ont même plusieurs comptes en ligne — un compte musulman et son compte habituel de gangster. Donc quand il est un peu religieux, il va là-bas [le compte musulman], et quand il devient ‘psycho’, il se connecte à l’autre, regarde du porno et d’autres choses. Et quand il veut être musulman, il va à la mosquée le vendredi pour rencontrer les autres, parler de l’islam, du Jour du Jugement, et autres questions — parfois assez profondes. C’est comme une thérapie.»

Il explique aussi qu’un tel mélange de deux identités est accepté à la fois par les groupes djihadistes et les gangs, car ils voient la société comme leur «ennemi commun». Cependant, les groupes djihadistes, face à la forte concurrence des gangs, ont de plus grandes raisons de faire preuve de tolérance. Avec la diminution de la capacité du milieu djihadiste suédois à attirer de nouveaux membres à la suite du déclin de l’EI, un nombre croissant de jeunes hommes qui auraient pu être recrutés sont désormais attirés par les gangs criminels.

Cependant, les récents développements à Gaza et au Liban sont perçus comme une chance divine par de nombreux individus des cercles djihadistes. Non seulement l’occupation israélienne de longue date des territoires palestiniens et les milliers de morts civils à Gaza suscitent des sentiments forts propices au recrutement de nouveaux djihadistes, mais le fait que certains membres de gangs s’attaquent désormais aux intérêts israéliens en Suède alimente également l’espoir d’une harmonisation future des opérations.

Des obstacles demeurent cependant pour cette harmonisation, au-delà de l’alignement occasionnel sur une même cible. Premièrement, les attaques ont jusqu’à présent été commanditées par l’Iran, un pays dirigé par un clergé chiite que les djihadistes sunnites considèrent comme leur ennemi. Deuxièmement, les motivations des auteurs ne sont jusqu’à présent ni idéologiques ni religieuses.

D’autres pays européens, comme la France devraient se préoccuper de voir ces groupes djihadistes se développer stratégiquement, s’interconnecter et apprendre souvent les uns des autres.

Marco Nilsson et Aya Bejermi

Pourtant, les groupes djihadistes y voient un grand potentiel de développement, car les jeunes auteurs sont des pages blanches, du fait de leur jeune âge et de l’absence d’engagement religieux ou idéologique préalable. Comme l’a expliqué un ancien recruteur de l’EI, ces jeunes ont été la cible traditionnelle du recrutement djihadiste. Les groupes djihadistes espèrent que les attaques des jeunes membres de gangs contre les intérêts israéliens, et les réactions sévères attendues des autorités, les amèneront progressivement à s’intéresser davantage à l’idéologie et les feront naturellement entrer dans un nouveau contexte de conflit polarisé : «La nouvelle stratégie consiste maintenant à influencer les gangs et à s’assurer qu’ils soient loyaux envers la lutte. Il y a aussi des sessions privées où ces membres de gangs viennent, s’assoient et apprennent.»

Les groupes djihadistes voient cela comme une solution possible à l’un des principaux problèmes du passé, à savoir que la plupart des membres du milieu djihadiste suédois, comme dans de nombreux autres pays européens, étaient plus intéressés à combattre dans des zones de conflit étrangères comme la Syrie. Motiver les gens à commettre des actes terroristes dans leur pays d’origine a été plus difficile. Certaines des attaques les plus dévastatrices de ces dernières années, par exemple en France, ont été perpétrées par des personnes habituées à l’utilisation illimitée de la violence sur les champs de bataille de Syrie et d’Irak. Cependant, malgré les affirmations initiales de l’EI et les craintes des services de renseignement, il n’y a pas eu de réserves humaines illimitées prêtes à se porter volontaires pour le terrorisme domestique en Europe.

La réussite des groupes djihadistes en Suède dans cette tâche reste incertaine. Jusqu’à présent, la majorité des jeunes membres de gangs ont été principalement attirés par l’argent et le statut au sein du gang. Cependant, l’usage répété de la violence extrême suscite chez beaucoup un désir de sens plus profond, auquel les groupes djihadistes sont prêts à répondre. Ces derniers affinent en permanence leurs stratégies de recrutement et d’opérations. D’autres pays européens, comme la France, qui possèdent également d’importants milieux djihadistes et des réseaux de gangs, devraient se préoccuper de voir ces groupes djihadistes se développer stratégiquement, s’interconnecter et apprendre souvent les uns des autres.

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